Sainte-Maigrine

La petite histoire locale par Alexandre Deborde journaliste  – avant 1953

 

Au cours d’une promenade dominicale, nous sommes allés avec l’actuel propriétaire, notre ami Edmond Dazelle, rendre visite aux vestiges imposants de l’antique ferme de Sainte-Maigrine.

 

Les bâtiments, granges, écuries et servitudes couvrent une superficie de 2 000 mètres carrés.

 

Inutile d’ajouter qu’une grande activité régnait autrefois dans cette ferme de 100 hectares d’excellentes terres. Mais des partages successifs l’ont si bien morcelée qu’elle se trouve réduite à 5 hectares : plus personne n’habite la maison. Le quéreux, les servitudes, sont le domaine de quelques poules et d’une multitude de lapins issus de croisement avec les garennes.

 

L’important groupe de bâtiments et les terres environnantes appartenaient vraisemblablement autrefois aux seigneurs de Benet ; une chapelle y avait été construite, on voit encore la niche dans laquelle était insérée une vierge à l’enfant. On prétend que les premières constructions de Sainte-Maigrine datent du IXe siècle. De nombreuses modifications y furent apportées par les propriétaires successifs. Certaines pierres qui ornent le faitage des servitudes semblent bien provenir des démolitions de la chapelle dont il reste encore un pilier.

 

Si nous remontons au temps de la puissante seigneurie de Benet, il est relativement facile de se faire une idée topographique de notre région.

 

À cette époque, les matériaux d’alluvions comblaient peu à peu le golfe du Poitou : Benet émergeait depuis longtemps ; de leur château-fort, les Lusignan avaient vue sur l’immensité. Au fur et à mesure qu’apparaissaient certains promontoires, on s’empressait d’y construire afin de mieux surveiller et au besoin se défendre contre les pirates, leur domaine.

 

C’est ainsi que naquirent vraisemblablement Peigland à l’est, Banzais au sud et Mervent (actuellement commune de Sainte-Christine) à l’ouest. Puis la mer se retirant toujours, on construisit la Grange au sud-est, Sainte-Maigrine au sud et Ambreuil à l’ouest-sud-ouest, d’où l’on pourrait surveiller les marais.

 

Sainte-Maigrine avait certainement pour mission d’empêcher les pirates d’approcher du port de Brouillat (Brouillac) situé à quelques centaines de mètres à l’ouest et d’où les habitants embarquaient pour visiter les Rouchis.

 

Un tracé ayant la forme de tranchées d’approche dirigées vers le port du Bouillat existe encore dans un pré. Au lieu-dit Champ-du-Bois, une grande bataille a été livrée contre les Normands. On a découvert plusieurs squelettes, des pierres tombales et différents objets d’attaque ou de défense.

Les barbares y furent certainement vaincus. Les seigneurs poursuivaient leur conquête « pacifique » firent construire encore plus au sud, sur une « motte », la première maison de la Sotterie où ils avaient un lieu de pêche.

 

Sainte-Maigrine était alors à l’apogée de sa puissance... Sainte-Maigrine est en voie de disparition.