Chanson écrite vers 1910 sur les artisans, commerçants du moment - voir ici

Vieux métiers - Vieux outils
Ville de Coulon - Coulon info n° 5 - mars 1996


Si l’on feuilletait le livre du temps ensemble, nous reviendrions à l’image du village d’autrefois. Notre cœur battrait au rythme des métiers. Que de souvenirs nous reviennent en mémoire, à l’évocation du sculpteur du bois, du menuisier, du tonnelier.
Chez le sabotier, l’apprenti prend son tablier et s’installe afin de dépouiller le bois de son écorce, puis il va le débiter en tronçons, correspondant aux longueurs maximales des sabots. En saboterie, le bois se travaille quand il est à moitié sec. Le sabotier est entouré de ses outils : la hache à épaule de mouton qui sert pour le bûchage, la mailloche pour frapper le bois sur le billot, la tarière-vrille pour faire des trous, les cuillers de différentes formes, enfin le racloir flexible nécessaire pour le polissage et l’élimination complète des côtes du sabot.
Pour les décorations, le sabotier utilisait des gouges, petits instruments permettant de faire des entailles et des moulures. Certains sabots étaient cirés ou tout simplement fumés.
Plus loin, le sculpteur sur bois est en train de fabriquer une jolie coupe à fruits. Il travaille avec les mêmes outils que le sabotier. Par contre, il conserve la trace artisanale à son œuvre. Il ne ponce pas, mais il laisse intentionnellement la marque des outils. Le travail du bois est une recherche permanente.
L’atelier du sculpteur sur bois est sans doute le lieu de rencontre entre le créateur et son œuvre.
Au soleil couchant, le menuisier s’empresse de rentrer les deux planches de bois qui étaient restées devant sa menuiserie – ici des rabots, des ponceuses, des scies et des parfums d’encaustique.
Des esthètes et des hommes libres
Le menuisier refait le meuble d’autrefois. Il s’est spécialisé dans la fabrication du meuble ancien. L’homme se penche avec amour sur le bois. Il passe et repasse le chiffon doux pour faire briller la planche de cerisier qui prend une couleur mordorée. Le menuisier est un esthète qui aime son métier avec passion.
La rue descend en pente douce vers la maison du tonnelier. L’ouvrier tonnelier est un homme libre. La disparition de ce vieux métier dans sa forme traditionnelle supprime une façon originale de travailler.
Le tonnelier possède tous ses outils ; il en est propriétaire et peut travailler chez son patron avec son bien propre.
Il y a peu de métiers aujourd’hui où l’ouvrier possède tous les outils nécessaires à son travail. Là est sa liberté.
L’ouvrier tonnelier était son maitre. Il était payé au prorata du nombre de barriques fabriquées. Comme c’était une affaire de rendement, le patron y gagnait aussi.
Voyons donc la fabrication d’un tonneau 

Le tonnelier commençait par entailler à la même longueur des douelles de chêne fendues à l’aide de sa scie à chantonner. Elles étaient ensuite parées avec le couteau de revers. Le tonnelier, à l’aide d’une doloire (vieil outil millénaire), sorte de hache à grand manche, enlevait de l’épaisseur aux douelles. Elles étaient assemblées en forme de tour puis enserrées par une dizaine de cercles de fer épais (cercle de moule) sur lesquels le tonnelier tapait avec sa chase et son asse (marteau spécial) jusqu’à ce que tous les joints des douelles se marient parfaitement. Cette opération nécessitait l’action d’un feu de bois allumé au milieu de la barrique afin que les douelles ne cassent pas en pliant sous les coups du marteau appliqués sur les cercles. La cage de fer qui tenait le feu allumé se nommait « gralasse ». Le fût était fermé, il était mis sur le basset…

 

Un métier qui s'en va : le pibalou
Ouest Éclair - 21 octobre 1935


 

 

 

 

 

 

Dernier vestige de temps révolus, voici un pibalou. Pour nos lecteurs qui ne sont pas familiarisés avec le poitevin, traduisons : un pêcheur d'anguilles. Il n'y a encore que quelques années nous voyions chaque soir sur la Sèvre, généralement des vieillards qui tendaient avec un soin jaloux leurs bourgnuns 1. La pêche à l'anguille était l'unique moyen d'existence de de ces vieilles personnes. L'anguille devenant de plus en plus rare, les pibalous disparaissaient rapidement. Nous avons eu la bonne fortune de rencontrer l'un des derniers représentants de ces intéressants pêcheurs.

Le père Métu a 82 ans, il aime passionnément son métier, il passe pour ainsi dire toutes ses journées à la pêche ou à la préparation de ses engins ou appâts. Il a bien voulu nous raconter pour nos lecteurs ce qu'il pensait de son métier. Laissons-le parler.

« Il n'y aura bientôt plus de pibalous, nous dit-il en substance. C'est un métier perdu. Il ne nourrit plus son homme. Autrefois nous pêchions des anguilles tant que nous voulions, il n'y avait qu'à tendre quelques botes 2 pour être sûr de prendre une boulleture 3 ; maintenant c'est bien différent. Tenez, hier soir, j'ai mis 25 bourgnuns ; ce matin je n'ai pas deux livres d'anguilles, et encore elles ne sont pas bien grosses. Il n'y a seulement que quinze ans, j'en aurais eu dix livres et des belles. On pêche toute la pibale 4 à Marans, c'est pour cette raison que nous ne voyons plus d'anguilles. L'espèce s'en perdra un de ces jours. Pêcher la pibale c'est une honte. Tous les maraîchins devraient protester : c'est comme si on tuait à leur naissance tous les petits enfants. Pourrait-on se plaindre ensuite de la dépopulation ? »

 

 

1-2 -  Nasses en osier.

3 -  Quantité d'anguilles nécessaires pour un repas - matelote.

4 -  Civelle, alevin d'anguilles.